Le Tchad a annoncé mettre fin à l’accord de coopération en matière de Défense, signé le 5 décembre 2019 avec la France, dans un communiqué du Ministère des Affaires Étrangères, de l’Intégration Africaine, de la Coopération Internationale et des Tchadiens de l’Étranger, en date du 28 novembre 2024.Ce communiqué ne s’y trompe pas en annonçant que cette décision « marque un tournant historique » et qu’ « il est temps pour le Tchad d'affirmer sa souveraineté pleine et entière…».C’est d’une part une nouvelle défaite, pas que symbolique, de la « Politique Africaine de la France » sous Emmanuel Macron, déjà marquée par une série de revers cinglants. D'autre part c'est une victoire pour le souverainisme Africain qui voit l'un de ses vœux pieux se réaliser d'année en année, à savoir le démantèlement de toutes les bases militaires étrangères sur le continent.« Tournant historique » et « souveraineté pleine et entière » pour le TchadAprès que les soldats français furent chassés du Mali et du Burkina, la France d’Emmanuel Macron s’était rabattue sur le Niger, au point d’en faire « le laboratoire du nouveau dispositif militaire français en Afrique » selon un article du journal Le Point. L’expérience fut de courte durée puisqu’à peine trois mois après cet article, l’arrivée au pouvoir au Niger du Général Tiani et du CNSP allait sonner le glas de la présence militaire Française au Niger.Ainsi fut constatée l’implosion progressive du G5 Sahel, autrefois présenté comme une alliance stratégique pour lutter contre le terrorisme dans la région. Mali, Burkina Faso et Niger ayant déjà exigé le départ des troupes françaises, exprimant leur désillusion face à une coopération militaire souvent jugée inefficace, paternaliste voire même complice d’un certain statut quo.La France pouvait alors compter sur son allié Tchadien, dont le Président Mahamat Idriss Déby avait été adoubé par Emmanuel Macron lui-même qui s’était rendu à son investiture alors qu’il venait de succéder à son défunt père de manière anticonstitutionnelle. Ce parrainage était perçu par de nombreux observateurs comme un énième épisode de la Saga FrançAfrique et une tentative de la France de garder la main sur son pré carré.Et elle croyait avoir réussi son coup au point que « Jean-Marie Bockel « envoyé personnel » du président français, affirmait le 07 mars 2024 à Ndjamena ; « Il faut rester et bien sûr, nous resterons », parlant de la présence militaire française au Tchad, il traduit certainement l’importance que revêt ce pays de l’Afrique centrale pour l’Hexagone et son envie d’y rester. » (Article de la BBC).Aujourd’hui, en rompant cet accord, le Tchad affirme sa volonté de prendre en main son destin en affirmant une « souveraineté pleine et entière » et en tournant une page de son histoire marquée par une dépendance sécuritaire continue envers Paris depuis l’opération Manta de 1983. Un « tournant historique » donc.Le Sénégal de Diomaye Faye et de Sonko emboite le pasCe même 28 Novembre2024, plus à l’ouest du continent, le Sénégal par la voix de son Président si bien élu, a également acté, le principe du départ des militaires français stationnés au Sénégal, et ce au nom de la souveraineté du pays. Dans un entretien avec l’AFP et France 2, il a déclaré : « Le Sénégal est un pays indépendant, c'est un pays souverain et la souveraineté ne s'accommode pas de la présence de bases militaires […] La France a esclavagisé, colonisé, et est restée. Si vous inversez les rôles, vous concevrez très mal qu'une autre armée puisse avoir une base militaire en France ».Les nouvelles autorités, Sénégalaises qui avaient été élues sur un programme de rupture, confortées par une large victoire aux législatives qui renforcent leur légitimité, pour mettre en œuvre leur programme de rupture tant au plan national qu’international.Une tendance irréversibleIl convient de rappeler qu’en marge d’une réunion du G5 Sahel spécialement convoquée par Emmanuel Macron en janvier 2020, la France demandait aux dirigeants Africains alliés une clarification de leurs positions sur la présence militaire française afin de la « relégitimer », au vu des contestations de plus en plus nombreuses et virulentes de cette présence. La ministre des Armées de l'époque, Florence Parly déclarait d’ailleurs à cet effet qu’il faut « tout d'abord obtenir des responsables politiques une position nette sur ce qu'ils souhaitent ou pas ».Quatre ans plus tard, quatre Etats du G5 Sahel, ont demandé le départ des troupes françaises de leur pays, sans compter le Sénégal qui vient également d’en émettre le souhait. Je crois que la clarification ne peut pas être plus explicite.Le bon sens voudrait donc que la France n’attende pas d’être chassé et qu’elle ferme d’elle-même ses bases au Sénégal, en Côte d’Ivoire, à Djibouti et partout ailleurs sur le continent où demeure encore cette trace de son passé colonialiste.Baïla Amadou TraoréCitoyen Africain de Guinée

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